Le rendez-vous était fixé à 14 heures, parking des Esclamandes avec Denis Huin, guide naturaliste et ornithologue qui nous a présenté les conséquences du bouleversement climatique sur les Zones Humides. Le temps est clément : 10 à 12°, pratiquement pas de vent, bonne luminosité, en revanche, le sol est bien gorgé d’eau suite aux précipitations abondantes du 31 janvier. Il y a environ 35 participants.
Petite marche en direction de l’est jusqu’au bord du fleuve Argens en profitant du passage d’une grande grue. Poste d’observation en face du club d’aviron. Une colonie de grandes perruches vertes y prospère depuis quelques années (initialement trois perruches relâchées d’une volière). Denis nous fait observer la couleur de l’eau : elle est marron, et ce phénomène se répète après chaque épisode de pluie, même faible. Ceci est dû au fait que les sols du bassin versant de l’Argens (qui couvre 2/3 du département du Var) sont « malades ». Les méthodes agricoles utilisées depuis les années 1930 et surtout dans les années 50 : prise en compte des caractéristiques physiques et chimiques du sol : labourage profond, apports nutritionnels chimiques, traitements chimiques phytosanitaires ont fragilisés les sols qui sont emportés à chaque précipitation.
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La composante de la vie organique : clé de la santé des sols, non prise en compte jusqu’à présent est primordiale. Les organismes vivants : débris végétaux, excréments animaux, insectes nécrophages, champignons, bactéries créent un sol vivant creusé de galeries par les vers de terre. L’eau est ainsi stockée lors des pluies, re-pompée par les plantes en cas de sécheresse. La terre n’est donc pas éliminée à chaque pluie. Il faudrait donc changer de paradigme (mot employé actuellement mais improprement pour philosophie) en passant à la permaculture : retrouver des sols vivants.
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Quelques pas plus loin, nous arrivons à l’embouchure de l’Argens. Depuis les romains la terre a gagné sur la mer jusqu’aux années 2000, depuis c’est le phénomène inverse. Pendant l’été 2018, un banc de sable barrait la sortie. L’eau s’éliminant en partie par infiltration et par les étangs. L’embouchure a été réouverte et une partie de la dune a été emportée par les violentes pluies d’automne. Un peu plus tard, une autre partie par les fortes tempêtes d’hiver. Ces phénomènes météo seraient normaux si ils n’étaient actuellement exagérés du fait de la transition climatique notée par une grande partie de la communauté scientifique. Si la montée du niveau de la mer se fait moins ressentir ici, (recul des falaises crayeuses normandes, perte de 40/100 des terres camarguaises … entre autres.), elle est tout de même préoccupante.
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Ce poste permet une bonne observation d’une colonie comprenant deux espèces de mouettes : les habituelles mouettes rieuses blanches, bec et pattes rouges, bout des ailes noires ; l’autre plus rare, la mouette mélanocéphale, toute blanche, bec rouge plus foncé.
Le dernier arrêt a lieu à l’extrémité est de l’étang des Esclamandes. Denis fait partie d’un groupe d’ornithologues mandaté par le musée d’histoire naturel pour faire des comptages réguliers : même site observé à la même époque. Il est noté une diminution de certaines espèces comme partout mais l’apparition d’autres de plus en plus importantes. Notamment des colonies de certains pouillots nichant en Europe de l’est qui abandonnent les Mers Noire et Caspienne pour leur hivernage au profit des zones humides plus à l’ouest comme Villepey. Les remontées attendues des espèces du sud vers le nord existent, mais le déplacement des populations d’est en ouest, surprenantes au début des observations s’expliquent par des conditions plus favorables à l’ouest, particulièrement en France. Mais celles-ci malheureusement retardent la prise de conscience sur les bouleversements climatiques en cours, de la part des décideurs de l’Europe de l’ouest en général et bien entendu de la France. Les feux de forêt de l’été 2018 en Suède, pays qui n’en avait jamais connu de cette ampleur, en sont un « bon » exemple…
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Merci Denis pour cet après-midi passionnant sur ce sujet très préoccupant, et merci Jean-Jacques pour le compte-rendu.
Tags: étangs, Nature, Villepey, zone humide protégée